Troisième détail digne de remarque : à la façade de l'Église, utilisant une ancienne porte, le Monument aux Morts. (Je ne connais pas pour le moment l'année de son édification NDLR.). Plus de CENT morts furent les victimes de la guerre de 14 (listes : 1914
- 1915 - 1916 - 1917 - 1918; plus de la douzaine pour la deuxième guerre mondiale (Liste). Les Fusillés de Port-de-Roche, à Port-de-Roche même ont leur mémorial (Page dédiée).
L'extérieur nous permet une quatrième constatation : Les ouvertures, vitraux et portes, ont le cintre du style roman, sauf les ouvertures retouchées ou plus récentes. Rien d'élégant comme un cintre. Si vous en avez un à quelque vieille maison, conservez-le. Tenez, quand vous allez en pèlerinage à Saint Joseph du Chêne Mort, regardez avant de sortir, avec quelle grâce le cintre de la porte encadre le paysage.
Cinquième détail, qui servira pour l'intérieur. Un peu avant le milieu de la muraille nord, dans la maçonnerie, il semble que de gros blocs sont les vestiges du haut d'une porte, donnant en face du bénitier qui est curieusement encastré dans un pilier de l'église.
Sixième détail : Avant de pénétrer par la grande porte, levez les yeux. Dans le bout de chacun des bas-côtés, il n'est pas impossible d'imaginer des ouvertures, condamnées par la suite. De plus, et ceci va se révéler très important, est-ce que les deux bas-côtés, plutôt que construits après le reste de l'édifice, n'ont pas été surélevés? On dirait bien qu'on discerne à partir de quel point cela se serait fait.
Entrons maintenant par la grande porte. Le bénitier que vous trouvez à main droite vient d'une vieille chapelle de Bréheil.
Saluons le Maître avant de visiter sa maison, on l'oublie trop! Un coup d'oeil d'ensemble, depuis le bas de l'église, montre que les arcades, sauf excepté que nous découvrirons, ne sont pas cintrées, mais ogivales. L'arcade appelée triomphale, qui précède la chambre des cloches, montre bien en effet des lignes brisées un peu comme deux mains l'une contre l'autre appuyées par l'extrémité des doigts, dans un geste
de prière.
La prière, un peintre de Rennes, Pierre Galle, l'a suggérée en peignant sur cet arcade la Vierge du "Salve Regina"? Que nos yeux aillent jusqu'au tableau du maître-autel, fâcheusement retouché (I)
(I) Un peintre, monsieur Cassin, a été désigné par les beaux-arts pour remettre ce tableau en son état primitif, et redonner leur éclat aux peintures de tout le Maître-Autel; d'où la présence des échafaudages dans le Chœur (1971).
Ayant admiré le tableau qui orne le maître-autel et prié Notre Dame de l'Annonciation, nous regardons de plu près cet autel central. De chaque côté, il y a les statues de Saint Pierre et de Saint Paul. Il y a deux anges adorateurs; puis tout là-haut, deux autres anges, œuvre aussi de P. Galle, exécutée pendant le rectorat de M. Grasland. - Le maître-autel avec son retable, en bois doré et peint-époque de Louis XIV, sont dans les objets classés parmi les monuments historiques. Arrêté su Secrétaire d'État à l'Éducation Nationale en date du 4 Août 1952 -.
Autrefois, sous la chambre des cloches, pendaient les cordes pour les sonneurs. Le bedeau et la "bedeaute" avaient du travail avec les cordes pour sonner les angélus; les carillons regrettés, annonces des grandes fêtes; les glas, les baptêmes et mariages, les messes du Dimanche. Quand on voulait dire d'un homme qu'il n'avait pas peur de se montrer à l'église, on disait : "Il va à la messe
sous les cloches" - Depuis M. Gautier, avec l'électrification (1930), rénovée par la suite, les cordes ont disparues.
Et maintenant, nous passons au bas-côté (souvent dit "collatéral") qui aboutit à l'autel de Saint Jean-Baptiste. Au-dessus de cet autel, le peintre y a figuré une voûté cintrée; ce mur, jadis devait s'ouvrir (I), la sacristie actuelle était l'absidiole (ou encore la chapelle) de Saint Jean-Baptiste, correspondant à l'absidiole ou chapelle de la Sainte Vierge dite du Rosaire.
(I) A propos de cette chapelle, voici une note transcrite par le Frère Alexandre :
Droits des Seigneurs du Bot en l'église de Langon en 1783 : "Déclare tenir des seigneurs du Bot, abbé, noblement à foy et hommage : une chapelle nommée de St Jean et vulgairement appelée "chapelle du Bot" en l'église paroissiale de Langon, du côté de l'épître, avec droit de tombe et enterrage en icelle, dans laquelle chapelle sont les armes
et armoiries des seigneurs du Bot, tant en grande vitre qu'en architecture au-dessus de l'autel avec banc à queue et accoudoir en ladite chapelle qui est percée d'une ouverture de porte sous la vitre du côté de midi pour sortir dans le cimetière. Outre, dans la même église, une autre petite chapelle, nommée chapelle et voûte de Roche, entre le chanceau et la chapelle de N.D. avec droits de pierres tombales et enfeux, banc et accoudoir..."
Continuons la visite du collatéral côté Saint Jean-Baptiste. Le bas-côté s'ouvre sur une voûte correspondant au cintre roman qu'il a inspiré au peintre, lorsque celui-ci a décoré l'arrière de l'autel. - Le plafond de ce bas-côté a été réparé d'une façon très malencontreuse; une boiserie qui aurait suivi le contour de la voûte, au lieu d'être plate, aurait une autre allure...!
Descendons ce collatéral et rendons-nous aux fonts baptismaux. Un baldaquin* que le cierge des baptêmes a malheureusement maintes fois touché de sa flamme, surmonte et encadre la sainte Fontaine. - Ceci est très émouvant, on est comme en présence d'une chambre. C'est là, peut-être, que vous, vos parents, vos enfants, vous êtes nés à la vie divine... Souvent on devrait s'attarder près des fonts baptismaux
à méditer et dire merci.
*Le baldaquin des fonts-baptismaux fait partie des pièces classées par les beaux-arts en notre église.
De cet endroit, admirons les arcs qui se coupent d'une façon originale, et le plafond qui suit artistiquement les contours de la voûte. Avançons un peu : à droite, village par village, voici les noms des victimes de la guerre de 1914. Ceci ne fait pas double emploi avec le monument extérieur où les noms sont gravés année par année.
Et maintenant nos yeux s'arrêtent tout d'abord sur le tableau de la Vierge du Rosaire. Cette troisième représentation de Marie continue bien les deux autres : "Voyez comme j'ai accueilli en ce monde le Fils de Dieu. Priez pour que je vous accueille dans l'autre. Mon chapelet sera la bonne chaîne qui vous attirera à votre Sauveur."
N'oublions pas de bien regarder ensuite la fresque qui surmonte le tableau du Rosaire. La reproduction photographique en est malheureusement rare. C'est la Père Éternel qui tend la main pour bénir. Un ange est près de cette image admirable - dans un médaillon - La Fresque a été découverte au cours des réparations pendant le rectorat de M. Allys, exactement en 1902.
Cette peinture pose un problème : on comprend bien un Christ, entouré des symboles ou emblèmes des quatre évangélistes; Saint Mathieu, dont les premières pages relatent les ancêtres du Christ, a comme symbole un homme, très tôt transformé en ange - Saint Marc, dont les premières lignes parlent d'une voix qui crie dans le désert, a un lion - Saint Luc, qui commence par une scène dans le temple, ce temple
où les prêtres immolaient des victimes, a un boeuf - Saint Jean, qui semble, dans son début, s'envoler jusqu'au ciel, pour nous dire qu'avant l'existence ici-bas selon la chair le Christ comme personne divine était là-haut près de son Père, ce St Jean un aigle comme signe.
Quand on représentait le Christ en majesté, on l'entourait des évangélistes qui lui ont rendu témoignage. Mais, Dieu le Père, pourquoi lui avoir adjoint le symbole de Saint Mathieu? et sans doute, on devait aussi avoir les symboles des trois autres, car il y a de la place... Il est difficile de répondre. J'ai entendu un professeur émérite dire que, peut-être, la fresque avait été retouchée; d'un Christ en majesté
on aurait fait un Père Éternel...
Avant de quitter la chapelle de la Vierge, n'apercevez-vous pas, sous la statue (admirée pour sa noblesse) du saint Diacre venu de la chapelle de Roche, la trace d'une entrée voûtée? Il n'est pas besoin de beaucoup d'imagination pour revoir seigneurs et grandes dames s'introduisant par là à leur banc, placé là où sont à présent les stalles du chœur. Car le chœur était autrefois moins long : la balustrade le
coupait à hauteur de la porte de notre actuelle sacristie. Par la pensée mettez-vous en face : une entrée et un banc parallèle de l'autre côté du cœur; peuplez-le aussi de seigneurs et de grandes dames... Comment se fait-il qu'on ait muré l'entrée placée sous la statue du saint de Roche, puisque la colonne où il y a une belle tête joufflue (très remarquable) coupe en deux cette ancienne entrée? La réponse est celle-ci : quand
on a muré l'entrée on a continué, avec des matériaux du pays, la colonne qui s'arrêtait précédemment à la figure joufflue...
Après un dernier regard à cette tête amusante et à la tête voisine assez effarante, tournez maintenant le dos à l'absidiole que vous avez vue et vous constaterez que le bas côté, contrairement au collatéral Sud s'ouvre par un arc ogival, à lignes brisées par conséquent, souligné par trois figures dont l'une tire la langue de s'âtre juchée si haut!
Le bénitier énorme qui se trouve à la retombée de cette arcade vous rappellera sans doute une de mes histoires : le bénitier qui bouge!! (Histoire que je n'ai pas eu, pour le moment, le plaisir de trouver. NDLR)
Une ingénieuse supposition a été faite. Voici : primitivement les bas-côtés n'existaient pas; il y avait la nef, le coeur et, de chaque côté du cœur, deux absidioles ou chapelles, celle de la Vierge et celle de Saint Jean-Baptiste; pas de sacristie. Ceci fin du XIe ou commencement du XIIe siècle - donc au temps des
croisades, comme vous le voyez.
Dans les siècles suivants, on aurait fait les bas-côtés et ouvert des arcades ogivales dans les murs de la nef, entre ces appuis qu'on appelle des contreforts.
Mais, à part un petit décollement du collatéral de la Sainte Vierge, on ne voit aucun indice qui confirme cette hypothèse... "En 1835 et 36, lorsqu'on a dépouillé le chœur et la nef du vieux crépi, écrit par François Lesné, alors recteur, l'on a remarqué aucune reprise, l'on a trouvé non plus aucune scissure. Ces murs, bâtis à chaux et à sable, et d'une
épaisseur imposante ne paraissent pas avoir éprouvé le moindre changement."
Abbé Jacques Porcher - 1971
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